Le licenciement en période de crise

LE LICENCIEMENT POUR MOTIF PERSONNEL EN PERIODE DE CRISE ÉCONOMIQUE PEUT ÊTRE CONTESTÉ, AINSI QUE L’UTILISATION DÉTOURNÉE DE LA RUPTURE CONVENTIONNELLE

Décembre 2020 (Droit du travail)


L’année 2020 a été marquée par une fragilisation de la situation économique des sociétés suite au premier puis au second confinement.


Les entreprises cherchent aujourd’hui à réduire leur masse salariale en établissant des licenciements collectifs. Très contraignants, les employeurs préfèrent  parfois se tourner vers des licenciements pour motif personnel, voire proposer une rupture conventionnelle. C’est bien entendu contestable !


  1. Licenciement pour motif personnel : Faute grave, insuffisance professionnelle, refus d’une modification du contrat ou des conditions de travail

 

Dans le contexte actuel lié à la crise de la Covid-19, ces licenciements sont souvent des licenciements pour motif économique déguisés et les employeurs espèrent ainsi éviter la mise en œuvre de plans de sauvegarde de l’emploi longs et coûteux.

Macintosh HD:Users:Agnes:Desktop:pngtree-continuous-line-drawing-of-law-symbol-of-weight-balance-png-image_1692552.jpgCependant, vous ne devez pas vous laisser influencer et devez réagir face à ce licenciement abusif. Si vous n’avez pas commis de faute vous pourrez obtenir des dommages et intérêts car le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

 

De même, en cas de résultats insuffisants (clause d’objectifs), l’employeur peut également lancer une procédure de licenciement. Le Conseil de prud’hommes va alors vérifier que l’insuffisance de résultat n’est pas fautive. Ce qui n’est à priori pas le cas en période de crise, d’autant plus si d’autres salariés affectés aux mêmes fonctions n’ont pas de meilleurs résultats.

 

Enfin, l’employeur peut choisir de modifier le contrat de travail en pratiquant une mutation géographique par exemple. Que votre contrat comporte une clause de mobilité ou non, il est possible de contester cette mesure si manifestement, elle n’est pas justifiée par l’intérêt de l’entreprise.

 

De façon plus subtile, il peut également être demandé au salarié de modifier ses horaires de travail. Si ce changement n’implique pas de modification du contrat de travail, et qu’il est apparemment justifié par l’organisation de l’entreprise, il s’avère difficile de le refuser sans commettre une faute.

 

En revanche, un changement d’horaires impliquant de travailler en soirée plutôt qu’en journée peut déboucher sur un licenciement qui devra être justifié par l’intérêt de l’entreprise, ce qui reste à prouver.

 

Si le salarié n’a pas la possibilité d’accepter ce changement pour des motifs qui lui sont personnels, tels l’état de santé d’un membre de sa famille, ou les horaires des transports en commun, il est possible de contester le motif du licenciement qui s’en suivra, même si le changement s’avère justifié car l’employeur doit dans la mesure du possible s’adapter à ces contraintes… 

 

Dans le cas où la modification du contrat interviendrait après une sanction disciplinaire, de surcroît si l’entreprise rencontre des difficultés économiques, les circonstances peuvent faire sérieusement douter de l’intérêt impérieux de l’entreprise, même si l’employeur en est seul juge….

 

2) La démission du salarié dans un contexte équivoque peut également être contestée

 

Il arrive parfois aussi que l’employeur pousse le salarié à bout dans l’espoir que ce dernier démissionne, ce qui lui coûtera moins cher…sans compter que le salarié démissionnaire perdra ses droits à percevoir des allocation chômage.

  

Macintosh HD:Users:Agnes:Desktop:pngtree-continuous-line-drawing-of-law-symbol-of-weight-balance-png-image_1692552.jpgIl faut bien avoir à l’esprit que vous avez tout intérêt à négocier une rupture conventionnelle de votre contrat de travail plutôt que donner votre démission.

 

Dans le cas où votre employeur aurait obtenu votre démission par la mise en œuvre de pressions, harcèlement, sanctions et reproches injustifiés, le caractère  équivoque de la démission sera remis en cause.

 


En effet, la démission doit impérativement être claire et non équivoque. Une jurisprudence récente est d’ailleurs venue préciser qu’une démission équivoque doit être requalifiée en prise d’acte de la rupture (Cass. soc., 20 Novembre 2019, n° 18-25.155).

 

À titre d’exemple récent, la jurisprudence a pu considérer comme équivoque la démission qui, bien que donnée sans réserve pour convenances personnelles, a été rédigée par un salarié dans un contexte de grande fatigue et en présence du directeur qui a indiqué qu’il allait appeler les gendarmes et porter plainte (Cass. soc., 23 Janvier 2019, n° 17- 26.794)

 

Il est important de privilégier une rupture conventionnelle de son contrat de travail, afin de négocier des avantages auxquels vous auriez dû avoir droit dans le cadre d’un licenciement.

 

3) La remise en cause de la rupture conventionnelle acceptée par le salarié dans un contexte de pression psychologique

 

Le choix d’une rupture conventionnelle ne doit pas être fait sous la pression de l’employeur qui cherche à éviter un licenciement économique ou disciplinaire.

 

En effet, à la différence de la démission qui peut être facilement remise en cause, il n’est possible de contester la rupture conventionnelle que si le consentement du salarié a été vicié, c’est-à-dire obtenu sous la pression, la menace. Il y a vice du consentement lorsque le salarié a donné son accord à une rupture conventionnelle par erreur, dol, menace ou violence (ce sont les vices du consentement au sens du Code civil.

 

En tout état de cause, si vous avez signé la rupture conventionnelle (dont vous devez avoir un exemplaire), et que vous souhaitez contester cette rupture, vous avez 15 jours pour le faire savoir à votre employeur (garder un justificatif).

 
  1. Le recours à la rupture conventionnelle dans le but d’éviter un licenciement pour motif économique.

 

La rupture conventionnelle ne doit pas dissimuler un licenciement pour motif économique.

Dans ce cas,  la DIRECTEE peut refuser l’homologation de la rupture.

Le salarié quant à lui pourrait remettre en cause la rupture conventionnelle en raison du détournement des règles applicables au licenciement économique.

 
  1. L’abus de pouvoir disciplinaire de l’employeur dans la négociation des conditions de la rupture conventionnelle.

 

Vous devez être d’accord sur les toutes conditions de la rupture conventionnelle, laquelle ne doit pas vous être imposée.

L’abus de pouvoir de l’employeur pour contraindre la signature d’une rupture conventionnelle n’est pas admis par la jurisprudence qui invalide la rupture conventionnelle.

 

Macintosh HD:Users:Agnes:Desktop:pngtree-continuous-line-drawing-of-law-symbol-of-weight-balance-png-image_1692552.jpg Si vous n’avez pas consenti aux conditions de la rupture conventionnelle, et notamment au montant de l’indemnité qui ne doit pas être inférieure à celle d’un licenciement, vous pourrez établir qu’au moment de celle-ci, votre consentement était vicié.

 

Pour la Cour de cassation (Cass. soc. 29 Janvier 2020, n° 18- 24.296), un salarié qui accepte une rupture conventionnelle alors qu’il subit un harcèlement psychologique, est en droit d’invoquer un vice de son consentement et obtenir des dommages et intérêts du fait de la rupture injustifiée de son contrat de travail.